Je suis célibaprof. Le néologisme est facile à comprendre.

Célibaprof : lorsque j’évoque ce statut, mon interlocuteur se laisse toujours une ou deux minutes de réflexion, le temps d’en venir au relatif hermétisme du milieu qui pousserait les profs à se reproduire entre eux (eh oui, il faut bien partager TOUT ce temps libre avec quelqu’un) :

« Oh, il doit bien y avoir un jeune prof de sport mignon dans ton bahut, non ? ».

Le sujet du prof de sport mignon pose problème. Parce qu’il n’a en fait jamais existé. Il est relégué au rang de mythe. Soyons honnêtes : le prof de sport, c’est une espèce bien à part au sein d’un établissement.

Champion de touchball

Premièrement, il est indéniable que ce spécimen ne s’habille pas comme nous autres : il part travailler en jogging, baskets, et j’avoue que cet uniforme peut être plutôt cool et sexy ; or, une ou deux fois par an (aux fêtes de noël et de fin d’année, respectivement), le mec se pointe en civil et l’on découvre avec horreur et déception qu’il est en réalité un homme comme les autres ; pire, que son look est vraiment dégueulasse.

En outre, le prof de sport vit, assume, et entretient sa connerie, et ce n’est pas désagréable. Il n’a pas sans cesse à prouver sa valeur intellectuelle : s’il fanfaronne, c’est pour montrer ses biceps ou ses derniers résultats au championnat régional de touchball. Et non pour montrer au monde entier sa connaissance de l’imminente transcendance de Dieu dans la société sinophone du XVIIe siècle… Il appelle un ballon «  référentiel bondissant », et tout le monde trouve ça génialement drôle.

Pourtant, le prof de sport cherche souvent l’amour. Queutard converti, il a maintenant une situation et ne peut plus simplement jouer de ses abdos le vendredi soir au « duplex », dans la semi obscurité de la salle pour choper des filles après un zouk endiablé – le prof de sport zouke, et possède un bon balancement des hanches, car il a étudié la gymnastique rythmique en L2.

Il est en chien

Malheureusement, passé 30 ans, toutes ces années d’abrutissement l’ont rendu peu subtil. Il ne sait plus draguer une meuf de façon civile et sensuelle, et, ne mâchons pas nos mots, il est en chien.

L’année dernière, très naïve, très altruiste, et surtout très casée, j’ai accepté l’invitation d’un prof de sport de mon bahut. J’ai simplement dû fuir une ambiance tamisée, dans laquelle H., alors habillé en civil (cf. plus haut) a souhaité me masser le dos pour me détendre. Assise sur une chaise, j’ai alors pu sentir ses parties intimes, gonflées d’assurance, se coller contre mon dos.

L’essentiel de mes propos ne concerne, bien entendu, pas toute la masse grondante (si, si, je les entends se rebeller) des profs d’EPS, qui, loin d’être des imbéciles, tentent de canaliser tant bien que mal l’énergie débordante de nos jeunes collégiens en pleine poussée de d’hormones.

Sans eux, nos cours ressembleraient encore plus à une basse-cour paniquée par l’arrivée d’un renard.

Plus généralement, le sport insuffle à nos élèves le sens du respect, du courage, du partage, valeurs qui feront d’eux, d’après moi, de bonnes personnes.

Allez je m’enfonce : jamais je ne me maquerai avec un prof de sport – même par correspondance, avec 6 heures de décalage horaire et six whisky coca trop chauds dans le nez – qu’on se le dise.