BIEN DANS MES BASKETS ET DANS MA VIE, ces gens en couple commencent sérieusement à me pourrir mon célibat. Je ne doute pourtant pas de leur envie sincère de me sauver de ma situation de célibatarde.

Prenez d’abord ma collègue au boulot qui, un jour m’expose ses projets bébé aussi détaillés qu’un fichier excel, et sa relation de couple au beau fixe la journée suivante.

Cette même collègue, peu de temps après mon arrivée dans la boîte, se tourne vers moi un bel après-midi et me questionne d’un ton bienveillant : « et toi, ça fait combien de temps que t’es en couple ? ».

« Au pays des loosers »

Comment lui expliquer que mes années de célibat sont aussi nombreuses que les opérations subies par le menton des frères Bogdanov ?

Quant à cette amie, celle-qu’on-voit-tous-les-6-mois, elle ne manque pas de m’abreuver de compliments : « mais… je comprends pas t’es souriante, belle,intelligente et tu ne rencontres personne ? » Heuuuu… comment te faire comprendre que répondre à cette question est aussi compliqué que courir (et attraper) le bus en talons, avoir ses règles à Koh-Lanta, ou de rire à une blague de Jean-Marie Bigard ? (au temps pour moi).

Autre anecdote. Lorsque dans ma nouvelle boîte arrive le moment des présentations, c’est le drame : « Sophie, mariée, 3 enfants, chef comptable depuis 5 ans ». Bon, d’accord. « Alexandre, marié, 2 enfants, contrôleur de gestion depuis 10 ans ». Ca commence à être chaud… « Chantal, divorcée il y a 6 mois mais elle a sauvé sa vie en se maquant rapidement» (non, là j’invente). Et puis moi : « L***, célibataire, sans enfant, chef de projet depuis 5 minutes ». Je vois d’ici l’avion qu’on affrète pour me renvoyer au pays des loosers. La cause : expiration de visa plus rapide que prévu chez les gens normaux. Avec un post-it « célibatarde » collé sur le front.

Les post-it de l’amour

Mes collègues, affables, s’attellent à m’en débarrasser. Chaque nouveau contact professionnel, « potable et célibatard », devient à leurs yeux un potentiel prétendant : les « qu’attends-tu pour l’ajouter sur Facebook ? », « fais donc le premier pas ! », « fonce on n’a rien sans rien » sont presque devenus des litanies. Et je suis ainsi devenue l’héroïne du nouveau feuilleton à la mode dans l’entreprise : Les post-it de l’amour.

Pourtant, aucune de toutes ces personnes n’a pensé à me poser une question essentielle : comment vis-tu ton statut de célibatarde ?

Oui, c’est bien cette interrogation qui est importante. Et pas les autres, qui vous pourrissent votre célibat.

Je n’ai pas encore éclaté les boutons de mon mec

Quand vous voulez prendre votre temps, faire preuve d’un minimum d’exigence, esquiver les Tinder & Co, ou encore vous retrouver avec vous-même, ces personnes que vous affectionnez en temps normal en viennent sérieusement à vous agacer. Car elles vous rappellent à quel point les sms amoureux que vous ne recevez PAS vous rendent différents d’elles. Et omettent complètement les bienfaits du célibat.

Non, je n’ai pas encore fait pipi devant mon mec. Ni éclaté ses boutons. Le projet d’acheter un chat à deux est pour le moment absent de mes préoccupations. Mais je le vis bien. Je ne pars pas des soirées parce que l’autre est fatigué. Je peux mater sans avoir peur de me faire griller.

« On s’aime comme ça consomme », chante Stromae. Pour une fois, j’ai juste envie d’attendre avant d’aller faire les soldes.

Curly M.